Can You Fill It? 4×4


Chemins auto-évitants hamiltoniens sur la grille de 4×4

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Il s'agit de la totalité des 552 chemins différents sur la grille de 4×4. Chaque dessin consiste en un coup de pinceau unique sur du papier dessin format A4.

Considérons le dessin ci-dessus, on remarque que le coup de pinceau commence à droite et finit à gauche, cela se reconnaît à la charge d'encre. Dans la série, il y aura un autre dessin qui sera la même forme orientée identiquement, mais le coup de pinceau sera inversé. On nomme ces chemins, allers et retours ils sont éclatés dans deux séries différentes.

Série allers

Cette série constitue une archive indissociable de 256 dessins.

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Fiche technique
titre Can You Fill It? 4×4, série allers
description archive indiscociable constituée de 256 dessins
technique encre de chine au pinceau sur papier, identifiants sur étiquette au verso
dimensions variable, accrochage env. 2 × 10 m
année 2015

Série retours

256 dessins individuels qui ont commencé à être disséminés.

61 acro-cyfi-detail Ici présentés durant l'exposition Logiques de prolifération, Galerie Gourvennec Ogor, Marseille, 2016.

Fiche technique
titre Can You Fill It? 4×4, série retours
description 256 dessins individuels
technique encre de chine au pinceau sur papier, identifiants sur étiquette au verso
dimensions 29,7 × 21 cm
date 2015

Textes

Il y a 552 chemins différents qui passent une seule fois par les 16 cases de la grille de 4×4. Parmi ces 552 chemins, on peut identifier deux familles, les chemins allers, et les chemins retours.

Cette œuvre unique et indissociable est composée des 276 chemins allers.

Chaque chemin est unique, tracé d'un seul coup de pinceau à l'encre sur un format A4.

Ce projet est à comprendre de la manière la plus immédiate possible, de la façon dont s’offre l’art minimal, les formes sont données pour elles-mêmes, et surgissent de la question suivante : peut-on lister les chemins qui passent par toutes les cases d’une grille, ne passant qu’une fois par chacune ? Je ne me soucie pas des formes particulières engendrées, d’ailleurs si j’aborde une taille de grille je n’admets que deux stratégies, les réaliser toutes, ou produire une forme qui permette de les réaliser toutes. C’est le cas en 2012 avec l’impression de trames sérigraphiées omnipotentes complétées à la main.


L’exposition « Logiques de prolifération » montre la série complète à l’encre des cinq cent cinquante-deux chemins auto-évitants hamiltoniens sur la grille de dimension 4×4 cases. Les chemins auto-évitants hamiltoniens constituent l’ensemble des chemins possibles, ou lignes, passant par la totalité des cases d’une grille en ne passant qu’une fois par chacune, sous-entendu, sans jamais se croiser.

« Je cherche à produire des œuvres intégralement réductibles à leur énoncé. Il tient en quelques mots mais engendre une profusion de formes. Cette règle contient tous les chemins différents, c’est une façon de les coder. M’astreindre à les dessiner, c’est en prendre la mesure, à corps perdu, d’un unique trait de pinceau. Imaginons maintenant la grille de 17×17, qui est la plus grande grille pour laquelle nous sommes actuellement en mesure de donner le nombre de chemins possibles, il y a exactement cent trente-deux septillions huit cent cinquante-sept sextilliards neuf cent quatre-vingt-neuf sextillions quatre cent soixante- dix-huit quitilliards trois cent dix-huit quintillions neuf cent trente-neuf quadrilliards neuf cent trente-huit quadrillions huit cent quatre-vingt trilliards deux cent trente-neuf trillions cent cinquante neuf billiards quatre cent soixante-treize billions six cent quinze milliards deux cent vingt-cinq millions trois cent trente et un mille quatre-vingts chemins différents. Voilà l’abîme au bord duquel je danse. » David Lasnier

Exposition Logiques de prolifération, Galerie Gourvennec Ogor, Marseille, 2016.


Les chemins auto-évitants hamiltoniens de David Lasnier ne mènent nulle part tant l’œuvre va à l’encontre de toute approche philosophique et de toute invocation de transcendance. La volonté de rationalisation du processus artistique présente l’œuvre sous un horizon de sens hors de quiproquo, souvent dans le cadre de la documentation qui lui est généralement attachée ou qui est directement intégrée dans l’ œuvre. Conjointement, la démarche critique met en demeure dans l’art avec exigence nos capacités d’illusion et de projection subjective, nos commodités d’égarement, notre duplicité, notre méconnaissance, notre inculture. La polysémie issue du regardant, l’argument d’autorité lié au rituel de l’exposition sont mis en distance.

Et pourtant, l’œuvre est là, exposée, présente à sa propre émergence et donnée au regard. L’intervention artistique qui pointe les limites même de l’art intègre un vibrato qui la révèle dans le mouvement de sa genèse. Partir d’une grille omnipotente. Au-delà des apparences, les propositions artistiques de David Lasnier retournent avec méthode le champ de l’art et donnent avec provocation des instruments d’évaluation.

Can You Fill It?

Remplir, une invitation simple et ludique ? Pas si sûr. Comment mesurer le possible de l’art ? Comment l’épuiser ? Un questionnement complexe naît de formes élégantes et maîtrisées, souvent arides, ironiques en souterrain, et parfois étonnamment poétiques. Au lieu des possibles, le chemin se trace dans le choix. Au temps du réel, le chemin existe dans l’art à apparaître. Voies sans issue. Sens à l’intérieur. Auto-genèse. Œuvre d’art.

Pascale Triol, Chemin(s), 2012.